Maman et Petit (1731-1742)
Chambéry, Lyon, Annecy, Genève, Nyon, Les Rousses, Besançon, Cluses, Charmettes, Montagnole, Grenoble, Moians, Saint-Marcellin, Romans, Valence, Livron, Montélimar, Pont Saint-Esprit, Remoulins, Pont du Gard, Nîmes, Pont de Lunel, Montpellier, Chapareillan
sep. 1731-aou. 1733 | aou. 1733-sep. 1737 | sep. 1737-a | sep. 1737-b |
sep. 1737-fev. 1738 |
fev. 1738-jul. 1742
Août 1733-septembre 1737
Chambéry, Genève, Cluses, Nyon, Besançon, Charmettes, Montagnole
- Août 1733, Rousseau part de Chambéry pour Cluses (CC 7).
- Août 1733, R. s'arrête à Genève (CC 7).
- 31 août 1733, R. passe à Cluses, au couvent des Cordeliers (CC 7).
- 1733, à Chambéry, R. fait la connaissance de F.-J. de Conzié qui habitait au numéro 96 de la rue Croix d'Or (OC I, p. 213-214).
- Mai-juin 1735?, voyage probable à Nyon et Besançon (CC 10 notes explicatives et CC 26 note explicative d).
- Printemps 1735 ou 1736 (voir OC I, p. 1338-1341), épisode de la pervenche, sur le chemin des Charmettes (OC I, p. 226).
Le prémier jour que nous allames coucher aux Charmettes, Maman étoit en chaise à porteurs, et je la suivois à pied. Le chemin monte, elle étoit assez pesante, et craignant de trop fatiguer ses porteurs, elle voulut descendre à peu près à moitié chemin pour faire le reste à pied. En marchant elle vit quelque chose de bleu dans la haye et me dit: voila de la pervenche encore en fleur. Je n'avois jamais vû de la pervenche, je ne me baissai pas pour l'examiner, et j'ai la vue trop courte pour distinguer à terre des plantes de ma hauteur. Je jettai seulement en passant un coup d'œil sur celle-là, et près de trente ans se sont passés sans que j'aye revû de la pervenche, ou que j'y aye fait attention. En 1764 étant à Cressier avec mon ami M. du Peyrou, nous montions une petite montagne au sommet de laquelle il a un joli salon qu'il appelle avec raison Belle-vue. Je commençois alors d'herboriser un peu. En montant et regardant parmi les buissons je pousse un cri de joye: ah voila de la pervenche; et c'en étoit en effet (OC I, p. 226).
- A partir du printemps 1735 ou 1736 (voir OC I, p. 1338-1341), séjours aux Charmettes (OC I, p. 223 sq.). R. y a connu au moins deux maisons: la maison Revil et la maison Noëray. On suppose que R. a composé Le Verger de Madame la Baronne de Warens aux Charmettes. D'après la communication donnée par Monsieur Helmut Watzlawick, propriétaire actuel de la maison Revil, le cadastre de 1729 ne mentionne qu'un seul verger, celui de cette maison.
Verger cher à mon cœur, séjour de l'innocence,
Honneur des plus beaux jours que le ciel me dispense.
Solitude charmante, Azile de la paix;
Puissai-je, heureux verger, ne vous quitter jamais (OC II, p. 1124).
- A partir du printemps 1735 ou 1736 (voir OC I, p. 1338-1341), séjours aux Charmettes (OC I, p. 223 sq.). R. y a connu au moins deux maisons: la maison Revil et la maison Noëray. Le Musée des Charmettes se trouve dans la seconde.
Après avoir un peu cherché, nous nous fixames aux Charmettes, une terre de M. de Conzié, à la porte de Chambéri, mais retirée et solitaire comme si l'on étoit à cent lieues. Entre deux coteaux assez elevés est un petit vallon nord et sud au fond duquel coule une rigolle entre des cailloux et des arbres. Le long de ce vallon, à mi-côte sont quelques maisons éparses fort agréables pour quiconque aime un azile un peu sauvage et retiré. Après avoir essayé deux ou trois fois de ces maisons, nous choisimes enfin la plus jolie, appartenant à un Gentilhomme qui étoit au service, appellé M. Noiret. La maison étoit très logeable. Au-devant étoit un jardin en terrasse, une vigne au dessus, un verger au dessous; vis-à-vis un petit bois de Chataigniers, une fontaine à portée, plus haut dans la montagne des prés pour l'entretien du bétail; enfin tout ce qu'il falloit pour le petit ménage champêtre que nous y voulions établir. Autant que je puis me rappeller les tems et les dates, nous en primes possession vers la fin de l'été de 1736. J'étois transporté, le prémier jour que nous y couchames. O Maman! dis-je à cette chère amie en l'embrassant et l'inondant de larmes d'attendrissement et de joye: ce séjour est celui du bonheur et de l'innocence. Si nous ne les trouvons pas ici l'un avec l'autre, il ne les faut chercher nulle part (OC I, p. 224).
Je me levois avec le soleil et j'étois heureux; je me promenois et j'étois heureux, je voyois maman et j'étois heureux, je la quittois et j'étois heureux, je parcourois les bois, les coteaux, j'errois dans les vallons, je lisois, j'étois oisif, je travaillois au jardin, je cueillois les fruits, j'aidois au ménage, et le bonheur me suivoit par tout; il n'étoit dans aucune chose assignable, il étoit tout en moi-même, il ne pouvoit me quitter un seul instant (OC I, p. 225-226).
Je me levois tous les matins avant le soleil. Je montois par un verger voisin dans un très joli chemin qui étoit au dessus de la vigne et suivoit la côte jusqu'à Chambéri. Là tout en me promenant je faioais ma priére, qui ne consistoit pas en un vain balbutiement de levres, mais dans une sincére elévation de cœur à l'auteur de cette aimable nature dont les beautés étoient sous mes yeux. Je n'ai jamais aimé à prier dans la chambre: il me semble que les murs et tous ces petits ouvrages des hommes s'interposent entre Dieu et moi. J'aime à le contempler dans ses œuvres, tandis que mon cœur s'élève à lui (OC I, p. 236).
Une maison isolée au penchant d'un vallon fut notre azile, et c'est là que dans l'espace de quatre ou cinq ans j'ai joui d'un siécle de vie et d'un bonheur pur et plein qui couvre de son charme tout ce que mon sort présent a d'affreux (OC I, p. 1099).
- Dès le printemps 1735 ou 1736, dîners sur l'herbe à Montagnole (OC I, p. 244).
- 25 août 1736, promenade avec Mme de Warens aux Charmettes, sur la côte opposée (OC I, p. 244-245).
J'avois proposé d'aller parcourir la cote opposée à celle où nous étions, et que nous n'avions point visitée encore. Nous avions envoyé nos provisions d'avance, car la course devoit durer tout le jour. Maman, quoiqu'un peu ronde et grasse ne marchoit pas mal; nous allions de colline en colline et de bois en bois, quelquefois au soleil et souvent à l'ombre; nous reposant de tems en tems, et nous oubliant des heures entiéres; causant de nous, de notre union, de la douceur de notre sort, et faisant pour sa durée des vœux qui ne furent pas exaucés. Tout sembloit conspirer au bonheur de cette journée. Il avoit plu depuis peu; point de poussiére, et des ruisseaux bien courans. Un petit vent frais agitoit les feuilles, l'air étoit pur, l'horizon sans nuage; la sérénité régnoit au Ciel comme dans nos cœurs (OC I, p. 244).
- 18 juillet 1737, R. est à Genève pour l'héritage (CC 15; OC I, p. 246-247). A cause de sa conversion, R. ne peut pas séjourner officiellement dans la ville. Il descend probablement dans un cabaret de Grange-Canal (CC 15 note e; «Chronologie», p. 26).
- 21 août 1737, à Genève, R. voit les troubles (OC I, p. 215-216).
[...] lorsqu'on prit les armes en 1737, je vis, étant à Geneve le pere et le fils sortir armés de la même maison, l'un pour monter à l'Hôtel de Ville, l'autre pour se rendre à son quartier, sûrs de se trouver deux heures après l'un vis-à-vis de l'autre, exposés à s'entre égorger. Ce spectacle affreux me fit une impression si vive que je jurai de ne tremper jamais dans aucune guerre civile, et de ne soutenir jamais au dedans la liberté par les armes ni de ma personne ni de mon aveu si jamais je rentrois dans mes droits de citoyen (OC I, p. 216).
- Après le 21 août 1737, R. rentre à Chambéry.
sep. 1731-aou. 1733 | aou. 1733-sep. 1737 | sep. 1737-a | sep. 1737-b |
sep. 1737-fev. 1738 |
fev. 1738-jul. 1742